Aude, Gard, Hérault 05/04/2022
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La grenade d’Occitanie dégoupillée

Gage de garantie de qualité, d’origine et de traçabilité, le dépôt d’une marque collective ‘Grenades d’Occitanie – France’ est une première pierre posée à l’édifice d’une structuration régionale de la filière. Au Domaine de Bayssan, à Béziers, le 24 mars, lors de son assemblée générale, la Fédération des producteurs de grenade du Sud a dévoilé les étapes de constitution de cette marque et présenté les différentes pistes de valorisation des co-produits de la grenade.

La Fédération des producteurs de grenade du Sud dispose désormais de sa marque collective, ‘Grenades d’Occitanie - France’. © Ph. Douteau

Nouveau niveau atteint pour la fusée grenade d'Occitanie. En préalable à l'obtention prochaine d'une IGP (Indication géographique protégée), et aux dépôts des statuts juridiques de la marque collective, la Fédération des producteurs de grenade (FPG) du Sud avait convié les arboriculteurs de la région, ainsi que des voisins de Paca, et des chercheurs venus rendre compte des résultats d'une enquête menée en Occitanie, pour mieux appréhender une filière encore peu structurée, mais dont les débouchés de revalorisation ne manquent pas. 

Une marque collective préalable à l'IGP

Accompagnés par l'Institut régional de la qualité agroalimentaire (Irqualim) et suivis par l'Inao, les producteurs de grenade d'Occitanie ont dévoilé leur marque collective auprès des adhérents de la Fédération, à l'invitation de Pierre Colin. À l'issue de deux ans de travail, la démarche vise à "protéger nos productions et à garder un niveau de prix", assure le président de la Fédération des producteurs de grenade du Sud. Grâce au dépôt de la marque et du logo à l'INPI (Institut national de la propriété industrielle), 'Grenades d'Occitanie – France', la filière peut ainsi compter sur un cadre réglementaire assurant une "production sur le territoire et transformé en France", indique Pierre Colin. Alors que "certains ne respectent pas ce qui est inscrit sur l'étiquette, en présentant une production locale en fait issue d'achat de grenades étrangères", la marque collective déposée par l'association des producteurs est aussi un rempart contre les fraudes, fait valoir Anne Purseigle, secrétaire générale du syndicat. Avant-projet annonciateur d'un signe de qualité (IGP), la marque implique un cahier des charges à respecter, de la conduite culturale au conditionnement des produits. 

Si l'IGP a été retenue, en raison d'une carence de variétés typiquement endémiques d'Occitanie, il n'empêche que l'origine comme la qualité des jus sont à protéger. Par la création d'une marque collective, l'association des producteurs de grenade du Sud sera compétente pour gérer les contrôles au verger.  

Frais, jus, flyers : un logo à décliner 

En protégeant producteurs et productions locales, "sans fliquer les gens", précise Pierre Colin, la marque collective est ouverte aux producteurs agréés adhérents à la fédération qui pourront utiliser le logo afférant, d'après le Code de propriété industrielle (Art. L 715- 1). Étiquettes, emballages, produits promotionnels de l'entreprise, mais aussi sur les grenades en frais, en y apposant l'autocollant, "vous pouvez le décliner sur tous vos produits", encourage Pierre Colin. Propriété de la FPG Sud, la marque est gérée par le conseil d'administration de la fédération, qui centralise les demandes d'adhésion et d'utilisation sur les produits à base de grenade et les jus, mais aussi les visites préalables ou la gestion des non-conformités. Le contrôle de l'origine et de la traçabilité des produits permet alors de "prouver d'où viennent les grenades, et de quelle parcelles", selon Anne Purseigle. "La transition en jus ou en vinaigre devra obligatoirement être réalisée en Occitanie", ajoute la secrétaire générale. 

Des variétés inscrites (les principales plantées) aux conditions de production (fouloir, égrappoir, pressurage à bande ou pneumatique, durée de congélation), le règlement d'usage a ses contraintes, que Pierre Colin voit comme "une garantie et une assurance pour vous, producteurs", qui s'engagent à fournir à la fédération les informations exactes et complètes.  

Des analyses sensorielles ont été menées pour "commencer à travailler sur des profils", mais à la différence des vins, aux nuances organoleptiques plus riches, la grenade a aussi ses caractéristiques nuancées. Avec une dominante marquée par ce "goût de betterave, l'acidité et la sucrosité", elle comporte aussi quelques arômes secondaires, comme des "notes acidulées de bonbon anglais" sur la variété Provence, mais "peu décelées", précise le président. La variété Acco, observée en Espagne en 2016, s'avère "intéressante", de par sa "belle couleur rouge", malgré sa qualité moyenne en frais et sa moindre résistance au botrytis. 

Une dynamique de plantation constante

Pour mieux cerner les attentes de la filière et de l'aval, une enquête a été réalisée dans le cadre du projet Feder GIMMS, co-financé par la Région Occitanie. Conduits sous la supervision de Valérie Olivier, maître de conférence à l'Ensat Toulouse, les travaux de recherche ont mis à jour les "problèmes d'identification de la grenade", peu considérée comme "une culture à part entière", relève Théo Châtelier. En enquêtant auprès des producteurs recensés, l'échantillon suivi comprend "au moins 180 producteurs et environ 400 hectares" plantés, souvent par des viticulteurs ou des arboriculteurs diversifiés. 

Il ressort de l'enquête un essor des plantations, qui "pourraient doubler" prochainement, en raison de la progression du nombre de producteurs, principalement engagés en AB (78 % des plantations), valorisant mieux leur production en vente directe. Si "85 % des producteurs ont des rendements allant de 0 à 5 t/ha en 2021", c'est à relativiser en raison de la gelée d'avril et de nombreux plants plus jeunes, note le chercheur. En raison des faibles surfaces en moyenne par exploitation, les trois quarts du verger occitan représentent un tiers de la production totale, pour des rendements moyens de 12, 8 t/ha, et selon une médiane de 10 t/ha. 

En choisissant des variétés issues de pays limitrophes (Italie, Espagne), la production en région doit tout de même tenir compte des conditions pédoclimatiques forcément différentes. 

Valorisation des co-produits : quels débouchés ? 

Outre les plantations prévues à la hausse, qu'en est-il du marché des co-produits de la grenade ? Pouvant être rentabilisée, au-delà des jus, dans une logique d'économie circulaire, les producteurs "peuvent valoriser ces co-produits, tout en s'assurant un potentiel de production", explique Valérie Olivier. "Dans dix ans, un gisement de co-produits pourrait représenter entre 100 et 300 t chez les gros pressureurs, et de 3 à 50 t chez les petits", annonce Théo Châtelier. Le sud de la France aurait près de 2 000 t de co-produits à gérer. 

Ces résidus se déclinent en deux catégories, selon Gaëtan Girard, doctorant en économie (Inrae - Ensat Toulouse). D'une part, les co-produits externes, soit les cuirs du fruit (32 à 64 % de la matière sèche), et les produits internes tels que les pépins, plus infimes (14 à 22 %). Par l'extraction des molécules d'intérêt, comparables à celle du fruit (anti-oxydants, polyphénols, tannins, acides gras), il est possible "de tirer une valorisation à haute valeur ajoutée", assure Gaëtan Girard. Ainsi, il serait possible de bénéficier d'une valorisation totale "à chaque étape de la transformation", pour la production alimentaire ou l'industrie cosmétique. Deux scenarii ont été envisagés, pour réduire les coûts de transformation. En séchant les pépins plus vite avant le pressage, et en séchant les peaux en distillerie, pour des volumes importants, le choix d'une organisation en coopérative se tient mieux. Autre piste, le traitement des pépins et des peaux à l'usine de l'UDM (Union des distilleries de Méditerranée) s'avèrerait "utile au moins pour le séchage des pépins", indique le doctorant. Une organisation territoriale, en regroupant les investissements collectifs, permettrait une limitation des coûts. 

Pour s'assurer des revenus complémentaires face à l'aval, encore faut-il une demande et des besoins réels. Or, "on s'attendait à plus de demandes de l'industrie cosmétique notamment", admet Pierre Colin. Car, en effet, la force de frappe marketing de ce secteur repose sur une part infime de produit issu de la grenade, limitant les retombées d'une telle valorisation. Une étude de marché n'aurait d'ailleurs pas été nécessaire en vue d'évaluer les besoins, interroge une productrice ? "C'est l'étape d'après, pour envisager de récupérer les co-produits à notre échelle directe, comme au caveau", prévoit le président de la FPG Sud.

Philippe Douteau

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